mercredi 1er février 2012
Lorsqu’on évoque le problème des violences urbaines au Brésil, on a tendance à parler surtout des hommes jeunes. La plupart des victimes et des auteurs de violences étant des hommes, la situation des femmes qui sont contraintes de vivre et d’élever leurs enfants dans les favelas et de se battre pour obtenir justice est souvent passée sous silence.
Les villes brésiliennes souffrent depuis longtemps d’une criminalité élevée, dont l’origine est à la fois criminelle et policière. Certains des quartiers les plus pauvres et les plus fragiles du Brésil sont contrôlés par des bandes de trafiquants de drogue. En réaction, le gouvernement s’est lancé dans une surenchère répressive, avec des opérations policières visant des quartiers entiers et pas simplement les bandes criminelles.
La violence en toile de fond
Dans ces quartiers, les femmes vivent dans un climat d’insécurité permanente. Au lieu d’assurer leur protection, la police les soumet souvent à des fouilles illégales effectuées par des agents masculins, utilise à leur égard un langage grossier et discriminatoire et a recours à des manœuvres d’intimidation, surtout lorsque les intéressées tentent d’intervenir pour protéger un proche.
Les femmes qui luttent pour obtenir justice au nom de leur fils ou de leur mari se retrouvent en première ligne du combat en faveur du changement et risquent ainsi d’être de nouveau menacées et harcelées. Une femme a déclaré à Amnesty International : « On ne peut pas continuer à vivre dans ces conditions-là. On vit dans la peur. »
Les femmes sont également exposées aux agissements des barons de la drogue et des chefs de bande, qui décident des châtiments à infliger et des protections à accorder et qui utilisent les femmes comme des trophées ou comme monnaie d’échange. De plus en plus de femmes sont impliquées dans le trafic de drogue. Beaucoup finissent par se retrouver dans les prisons surpeuplées et insalubres du Brésil, où elles font l’objet de mauvais traitements physiques et psychologiques – lorsqu’elles ne sont pas violées.
Impact
Les conséquences de la criminalité et de la violence se font sentir dans des quartiers entiers, affectant gravement des services essentiels tels que la santé et l’éducation. Si un dispensaire est situé sur le territoire d’une bande rivale, les femmes devront peut-être parcourir plusieurs kilomètres pour consulter un médecin. Les services de maternité, les crèches et les écoles sont parfois fermés pendant de longues périodes à cause des opérations policières ou des violences criminelles. Les personnels de santé et les enseignants ont souvent trop peur d’aller travailler dans des quartiers rongés par la criminalité.
Faire cesser la violence
Les femmes ayant apporté leur témoignage à Amnesty International ont décrit très clairement leurs besoins :
une police qui les protège, elles-mêmes et leur famille, et qui leur garantisse une véritable sécurité
une égalité d’accès à la justice, quelle que soit la classe sociale
une protection qui leur permette de continuer à se battre en faveur des droits humains
une aide sociale et économique lorsqu’un proche est blessé ou tué par la police ou par des criminels.
L’État brésilien a pris certaines initiatives positives, par exemple en renforçant la protection des femmes victimes de violence domestique, mais il doit adopter d’urgence des politiques à long terme pour remédier aux vastes problèmes qui découlent de la violence et qui affectent la vie des femmes dans les quartiers marginalisés.
Par Rodrigue Tchuidjan