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Thierry Mouelle II : La course à la mangeoire n’a jamais épargné les milieux de la presse camerounaise

lundi 30 août 2010


Alors qu’il vient d’obtenir un International Executive MBA qui lui ouvre d’autres horizons, ce consultant en communication, littéraire, conseiller d’affaires, poète et journaliste de la première heure est un multicartes qui a accepté de nous parler de lui.

Pendant longtemps journaliste et Conseiller en communication stratégique, on vous a retrouvé dans la peau d’un romancier avec « Le Pharaon Inattendu », un livre bien accueilli par les critiques. Aujourd’hui Consultant en Management International, vous êtes, entre autre, titulaire d’un International Executive MBA. Et si on vous demandait, qui est Thierry Mouelle II ?

Je suis né au Cameroun il y a une quarantaine d’années et je vis actuellement à Paris. J’ai commencé ma carrière professionnelle comme journaliste politique et économique même si j’ai toujours versé dans la sociologie, la sémiologie, la philosophie et la poésie. J’ai embrassé le journalisme par la passion du partage de la connaissance et de l’information. J’ai travaillé à la Crtv radio pendant trois ans. Ensuite, j’ai été recruté comme chef des services politique et économie à Génération, un hebdomadaire d’enquêtes et d’analyses qui paraissait à Yaoundé. Je travaillais aux côtés de feu Vianney Ombé Ndzana, Directeur de publication ; Maurice Kamto, Administrateur délégué, feu Mongo Béti, Éditorialiste et Ambroise Ebonda, chef des services société et investigations. Je me suis assez vite rendu compte que la ligne éditorialaffichée contrastait profondément avec la réalité interne du journal.

Que s’est-il passé par la suite ?

J’y ai passé deux ans et je suis allé créer mon propre journal, Grands Horizons, un bimensuel. C’est à cette même époque qu’Ambroise Ebonda est également parti au journal Le Messager comme Rédacteur en Chef. Dans le contexte de remous sociopolitiques de l’époque et les sacrifices que cela demandait en termes de courage de positionnement, certaines grandes plumes du paysage médiatique camerounais, pour l’entretien de leur talent, d’autres pour m’apporter leur aide, ont contribué qualitativement au journal bien que ce fût essentiellement sous des pseudonymes.
À ma satisfaction, ils estimaient que le ton et le format périodique de Grands Horizons étaient plus à même d’aller au fond des sujets. Quelques acteurs de la vie publique, ou du moins ceux qui souvent se présentaient comme tels, virent notre approche d’un mauvais œil. Vous savez, beaucoup d’actes légalement ou moralement répréhensibles sont souvent posés par des individus zélés ou de moralité douteuse et qu’une certaine presse, par facilité, a tôt fait de mettre sur le dos personnel du chef de l’État. J’en ai eu plus d’une preuve à l’époque. Ces acteurs politiques usaient de tout, y compris de la violence, pour que leurs abus ne soient pas rendus publics. Certains de ces acteurs sont aujourd’hui décédés ou ne sont plus au pouvoir par effet de renouvellement de l’élite gouvernante, d’autres sont en prison pour des actes que nous dénoncions déjà à l’époque.

Et comment cela se passait du côté de l’opposition ?

À l’analyse, on avait du mal à cerner ses vraies motivations. En dehors d’une très forte agitation dans la rue, sa feuille de route politique manquait de clarté, comme si elle ne savait que faire du statut qui faisait d’elle, comme dans toute démocratie, l’incarnation « naturelle » de l’alternance. Beaucoup égrenaient une liste d’écarts politiques et socioéconomiques, qu’à leurs yeux, le Pouvoir ne cessait de creuser, ce qui était loin de les dédouaner des mêmes pratiques décriées. L’on avait l’impression qu’il s’agissait d’un règlement de compte entre princes d’une même famille, ou des leurres censés nous détourner de la priorité essentielle : la consolidation des frêles acquis démocratiques.
Nous sortions à peine de longues années de censure administrative et de liberté sous contrôle ! directeur de journal, je rencontrais des décideurs au Pouvoir comme au sein de l’opposition. S’il était clair pour le pouvoir qu’on ne gère pas un État comme on gèrerait une épicerie, et que l’instabilité de la conjoncture économique internationale exigeait de réajuster constamment les plans de croissance de l’économie nationale et de redéfinir les priorités budgétaires, du côté de l’opposition, j’avais fini par me lasser d’entendre le même slogan « Biya doit partir ». A la question de savoir ce qu’ils feraient à la place, vu la pertinence des arguments avancés par le Pouvoir pour justifier la flexibilité de ses actions, la réponse rendait perplexe : « Qu’il parte d’abord, ensuite on verra ».

A votre avis, quelles étaient les raisons d’une telle attitude ?

Peut-être une panne d’imagination ou l’Opposition manquait-elle de clairvoyance politique. Un troisième facteur y a sans doute joué un rôle clé : l’absence d’une vision stratégique à la fois globale et séquentielle dans l’esprit des décideurs. Tout le monde ne voyait pas demain comme un jour à construire, mais comme une fatalité. Demain sera là, quoiqu’on veuille. Peu importe son contenu.
De même qu’il était de mon devoir d’analyser avec froideur ce que les faits me poussaient à relever comme sujets de dangerosité quant à la cohésion nationale, ce qui devait attirer l’attention des gouvernants, de même je ne faisais aucune concession au manque de responsabilité de certains membres de l’Opposition. Dans le cadre de mes missions de Consultant en Communication Stratégique, j’ai fait une série de propositions sur ce que devrait être la gestion stratégique de quelques dossiers conflictuels, et comment le marketing politique du Cameroun pourrait être envisagé sur le plan international pour donner de la voix au droit qui était déjà de notre côté sur ces sujets précis.

Comment ces propositions ont-elles été accueillies ?

Favorablement. Les politiques qui m’avaient approché me savaient conscient du caractère sensible de ces dossiers. Je partageais avec eux l’idée que lorsque le pays était attaqué dans son intégrité, il revenait à chacun de ses enfants de le défendre sans réserve, chacun avec ses armes, mais coordonnées par le décideur suprême, le chef de l’État. J’appelle cette période, l’État d’Urgence Patriotique. Une fois la paix et la sécurité restaurées, chacun pouvait reprendre ses activités normales. En ce qui me concerne, il s’est toujours agi de séparer mes activités de Directeur de journal de celles de Consultant en Communication.
Certaines personnes cernaient mal la différence, tant au sein du Pouvoir que de l’Opposition. Pour elles, un journal ne pouvait être indépendant que d’un bord et non de l’autre. Être indépendant des deux, était absurde. Le clivage informationnel était tel que pour beaucoup, on devait être soit du côté du Pouvoir, soit de celui de l’opposition. Un peu comme devant un pavé mosaïque en noir et blanc, je quêtais perpétuellement la zone grise. Certains donnaient au mot « indépendance » le sens politique de sortie d’un système d’asservissement (ou de refus du futur asservissement qu’ils voyaient venir avec l’opposition) et non celui d’absence de parti pris. L’indépendance journalistique se résumait à saper l’action du gouvernement, ou celle de l’opposition, peu importait sa pertinence. Certains journalistes dits « indépendants » se faisaient ainsi les principaux porte-voix du programme « Biya doit partir » imaginé par l’opposition. Ou celui, simpliste, de « Fru Ndi est un illettré », imaginé par des universitaires proches du Pouvoir.
À la suite de quoi, des directeurs de journaux « indépendants » se sont vu ministre des finances, du budget ou de Responsable de la Communication Présidentielle de l’après-Biya qu’on disait alors inéluctable. Certains journalistes « indépendants » eux aussi, mais travaillant pour le Pouvoir, se mirent à attendre les fruits de leur « indépendance » en traquant la moindre rumeur relative à leur nomination à la tête de la Sopécam, la Crtv, ou même, bonheur suprême, leur entrée au gouvernement. J’étais de ceux qui décriaient cette indépendance dépendante.
Mais le Cameroun n’était pas prêt pour une information dépassionnée ; je ne sais pas s’il l’est déjà. Quelques professionnels comme Mutations ou Le Jour, montrent la voie. Le ministère de tutelle s’échine à clarifier le jeu, mais ce n’est pas facile. La course à la mangeoire n’a jamais épargné les milieux de la presse camerounaise.

Et puis vous avez quitté le Cameroun. C’était en 1998. Voulez-vous revenir sur les circonstances de ce départ ?

Non, le passé, c’est le passé. Seul l’avenir m’importe et je compte y intégrer tout le monde de bonne volonté. Ce n’était pas facile de venir d’Afrique et se faire accepter dans le cercle élitiste de journalistes français. J’avais vingt-neuf ans. Mon parcours rapide faisait peser un soupçon de faux sur mon CV.
Parfois, je me sentais presque coupable d’être ce que je suis. Je fais à peine quelques piges dans les journaux associatifs qui souvent « oublient » de payer. J’écris pour un grand quotidien pour une saison ; je vends du contenu aux groupes de presse et de l’audiovisuel. Exercer en tant que journaliste en France quand on est d’origine africaine est extrêmement difficile. Ce n’est pas déjà facile pour les nationaux qui peuvent rester des années simples pigistes ou intermittents de spectacle alors qu’ils sont de vrais professionnels.

Comment avez-vous réagi face à ces difficultés ?

Il fallait opter pour de nouvelles perspectives avec des références françaises. Je suis retourné à l’université pour faire un Bac+5 en informatique, réseaux et gestion de projets. Cela m’a permis plus tard d’administrer et de diriger la rédaction du site www.Africafoot.com pendant quelques temps de même que celle de la chaîne de Télévision 3A Telesud, où j’ai travaillé à la refondation de la formule en tant que rédacteur en chef et éditorialiste.

Et puis, une rencontre va tout changer. Radicalement. Racontez-nous.
À l’occasion d’un dîner-débat dans lequel j’intervenais sur l’économie internationale, je fais la connaissance d’un haut responsable de la Société générale. Mon parcours l’intéresse, et il me recrute comme analyste chez Groupama Banque, une joint-venture que la SG mettait sur pied avec le géant de l’assurance Groupama. C’était fin 2002, début 2003. Formé à l’ouvrage et suivant des stages appropriés, je suis référent dans une équipe d’analystes de crédits. Je passe ensuite responsable des crédits aux particuliers, aux PME agricoles et aux Travailleurs Non Salariés, dès lors que ces crédits franchissent le seuil de 21 500 euros ou que le profil du client s’avère atypique et requiert une analyse de risque plus approfondie.
En 2004, j’ai pour mission d’étudier et de proposer à la banque les mécanismes de mise en place de nouvelles normes de gestion de risque telles qu’émises par le Comité de Bâle, notamment Basel II, volets I & II. Basell II contraint les établissements à réorganiser en profondeur les métiers, à créer de nouveaux services, et à élever le niveau de formation et de sensibilisation aux fraudes et blanchiments d’argent. La systématisation de la diffusion du savoir au sein de la banque devient un facteur de sécurité, de qualité et un sérieux gage de fidélisation de la clientèle.

Votre transition du journalisme à la banque semble donc définitive.
En effet. Les bases du projet Basel II posées, je suis chargé par le Directoire de créer une Unité de Management de la Connaissance, en 2006. Le projet exige une forte connaissance des métiers de la banque en général, la gestion des bases de données dynamiques, les réseaux informatiques, et un savoir-faire rédactionnel.
À l’ouvrage, je réalise le degré d’interrelation conjoncturelle existant entre les métiers de la banque et les métiers de l’assurance des biens et des personnes. Dès la fin des années 1990, les banques avaient débordé de leur périmètre traditionnel d’établissements de crédit pour rogner dans le domaine réservé des assurances dans le but de saturer la clientèle. Ce nouveau modèle économique appelé bancassurance, très étendu au sud de l’Europe, et quasi inconnu aux États-Unis et au Japon, a fortement contribué à l’atténuation des effets du crash financier de 2008-2009 sur les banques françaises.

Comment la bancassurance a-t-elle pu amortir le choc du crash financier en France ?

Le fait d’avoir une réserve de liquidité décentralisée dans leurs Unités d’affaires stratégiques que sont les comptoirs d’assurance, a permis aux banques françaises de garder une main sur l’économie réelle, contre la volatilité de l’économie spéculative des fonds de pensions issue du modèle de Wall Street. Elles ont pu ainsi contrebalancer les pertes. Le revers de la médaille, c’est que la bancassurance, en empiétant dans le domaine réservé des assureurs classiques, a contraint ces derniers à réagir. C’est ce qui poussa Groupama Assurance à requérir un mandat IOB (Intermédiaire en Opérations Bancaires) et à imaginer la création d’une banque en 2001.

Cette fois, il s’agit de l’assureur qui se fait banquier ?

Oui, et cela s’appelle de l’assurbanking. Mais les assureurs supposés distribuer les produits bancaires dans leur réseau n’y connaissent rien ; les banquiers qui devraient vendre l’assurance selon le model de la Banque Directe (sur Internet), et non au sein des comptoirs d’Unités Stratégiques, ignorent les mécanismes complexes des risques d’assurance. Le déploiement de ce nouveau modèle économique est donc difficile. Les managers, manquant de repères, compilent les process de la banque et ceux de l’assurance. Ce qui conduit au ralentissement du rythme de croissance ou simplement à l’échec. Il y avait donc matière pour mener des études scientifiques dont les résultats serviraient de base conceptuelle aux PME et PMI évoluant à l’ombre de multinationales, et au-delà, de charpente stratégique pour toute entreprise ou organisation désireuse de bâtir une stratégie de croissance rentable et pérenne.

Ce fut votre sujet de thèse de l’International Executive MBA ?

Oui. En l’élargissant au concept générique de Stratégies de croissance, ma contribution m’a valu d’obtenir mon diplôme avec la mention « Honors » au sein de ISM- International School of Management, une école de management américaine basée Paris, New York, Tokyo et Shanghai. Mon immersion au sein des multinationales comme Panasonic, Toyota, AT&T, WDT, Banque of America pendant de nombreux mois, m’a familiarisé avec les solutions-conseils adaptées à l’identification ou la réorientation stratégique des entreprises dans leurs différents cycles de croissance. Mes recommandations ont été suivies à la lettre.

Vous avez donc basculé complètement dans une nouvelle vie professionnelle ?

Oui, j’ai rassemblé mes 19 ans d’expérience professionnelle transversale pour devenir consultant en Business international et en Management Stratégique international. Mais rassurez-vous, je continue d’écrire des romans et des poèmes. C’est ce qui restera, quand tout sera fini. La Porte Secrète du Pharaon, mon prochain roman, paraît très bientôt.

Pour terminer cet entretien, un mot sur le Cameroun de votre enfance...
Le Cameroun de mon enfance c’est d’abord beaucoup de musique, Francis Bebey avec sa superbe chanson "Agatha", Tokoto Ashanti avec son tube "homme de chèvre", les Black Styll. C’était le règne continental du makossa, du Mangambeu avec Pierre Didi Tchakounté, Talla André Marie. Il y avait aussi Rachel Tchoungui, Eboa Lottin... Il y avait la radio, Radio Cameroun, avec des voix comme Samuel Ebanda, André Ngangué. C’était la belle époque avec des plaisirs simples et beaucoup d’imagination pour qu’on ne s’ennuie pas. Il n’y avait ni télévision ni Internet. Tout était vrai réel, même l’amitié.

Entretien avec Ingrid Alice Ngounou(Mutations)

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