lundi 17 janvier 2011
Jeune camerounaise surdouée, elle se veut au service des causes nobles. A 14 ans, étudiante à l’université, elle a échangé par courrier avec Barack Obama, Elisabeth II, Bill Clinton, Georges Bush, Angela Merkel…
Si on vous demande de vous présenter, que diriez-vous ?
Je viens tout juste de fêter mon quatorzième anniversaire. Je pourrais être qualifiée de précoce. A quatre ans, je connaissais déjà toutes les tables de multiplication et à l’âge de six ans, je lisais, résumais et interprétais les œuvres et essais philosophiques d’auteurs tels que Voltaire, Victor Hugo, Charles Dickens, ou encore Emerson. J’ai passé mon premier examen d’entrée à l’université (le Sat II Us History) à l’âge de onze ans avec un score de 780 points sur un total maximum de 800, surpassant de loin 96% de tous les candidats aux Etats-Unis qui avaient en moyenne l’âge de dix-sept ans. Présidents Bush et Clinton m’ont félicité pour cette performance. J’ai entre-temps passé deux autres examens avec des résultats comparables l’année suivante, à l’âge de douze ans. Au début de cette année, j’ai été invitée dans 5 pays différents (Etats-Unis, France, Royaume Uni, Allemagne, Irlande) par les chanceliers de 10 des universités les plus prestigieuses et
sélectives du monde à aller étudier dans leur établissement, en l’occurrence l’université de Cambridge au Royaume Uni, l’université de Dublin, la Sorbonne (Paris 1er), l’université technique de Munich, la Columbia University à New York, l’université de Boston, l’université de North Carolina Chapel Hill, Georgia Tech, l’université de Wisconsin-Madison, et la Nortwestern University.
Et qu’avez-vous choisi ?
Je n’ai pas encore pris de décision définitive, d’autant plus que toutes ces universités ont chacune une excellente réputation, ce qui rend le choix plutôt difficile. Ce qui est certain, c’est que je n’ai pas l’intention de poursuivre toutes mes études universitaires aux Etats-Unis. J’aimerais également étudier en Europe, où la mentalité est différente de celle des Américains. Je pense que ce serait une expérience très enrichissante.
Que faites-vous aujourd’hui ?
J’écris actuellement un livre. Après m’être rendue compte que tous les experts en économie dans le monde semblaient ne pas avoir perçu un aspect fondamental quant à la cause profonde et réelle de la crise économique actuelle, j’ai investi la majeure partie de l’année 2010 à adresser le problème de la récession auprès des plus grands dirigeants de ce monde et ainsi contribuer à alléger les souffrances de centaines de millions de personnes à travers le monde. Le livre sur lequel je travaille en ce moment porte sur cette expérience. Il présente les conseils et solutions que j’ai offerts à tous ces dirigeants, ainsi que mon parcours et la formation particulière qui m’a permis de développer la capacité d’aborder les problèmes de ce monde sous un angle très unique.
Qu’espérez-vous transmettre comme message à travers ce livre ?
J’espère qu’en lisant mon livre, le reste du monde découvrira à son tour ce que ces grands leaders savent déjà, en l’occurrence la cause profonde de la crise économique internationale et que les gens réajusteront la manière dont ils abordent la crise sur le plan individuel et collectif et par conséquent contribueront à atténuer les effets négatifs qu’elle a sur leur vie et à en limiter sa durée. J’espère aussi qu’en lisant mon histoire, beaucoup de jeunes gens de tous horizons seront motivés à activement contribuer au progrès et à l’essor de leur communauté et découvriront l’énorme potentiel qu’ils ont de faire la différence dans le monde.
En parlant de grands de ce monde, vous avez fait des échanges de correspondances avec des présidents, ministres et autres dirigeants. Racontez-nous tout ça.
J’ai en effet correspondu avec un total de 190 des plus grands dirigeants de ce monde dans les domaines de la politique, de l’éducation et de l’industrie. En fait, j’ai échangé ma première correspondance avec un président à l’âge de huit ans. Cependant, la majorité de ces échanges de correspondances datent des années 2009 et 2010 et portent sur les observations et recommandations que j’ai faites à ces dirigeants concernant la crise économique mondiale et les catastrophes industrielles de grande envergure, telles que la marée noire de BP ou encore les rappels massifs de produits défectueux qui non seulement
mettent les vies d’un grand nombre de personnes en danger et déstabilisent les entreprises qui les produisent, mais affaiblissent aussi considérablement le système financier international. Tous ces dirigeants m’ont répondu qu’ils avaient énormément apprécié mes conseils et m’ont promis qu’ils feraient de leur mieux pour les mettre en pratique. Qui sont ces personnes.
Donnez-nous quelques noms
J’ai reçu des lettres de 25 présidents, chefs d’Etat et de gouvernements tels que le Président Obama, le Pape Benoît XVI, la Reine Elizabeth II d’Angleterre, la Présidente Tarja Halonen de Finlande, les Premiers ministres d’Espagne et d’Australie, la Chancelière allemande Mme Angela Merkel, et bien d’autres. J’ai également reçu des lettres de 16 ministres de l’Education de pays comme la Suisse , les Pays-Bas, le Royaume Uni, le Danemark, Singapour, Taiwan, ou encore l’Espagne. J’ai suggéré à ces ministres de réviser le curriculum de leurs universités et de leurs établissements d’enseignement secondaires. Je leur ai également proposé des méthodes pratiques afin de réadapter ces curricula aux problèmes du vingt-et-unième siècle. De plus, 103 Présidents-Directeurs-Généraux des plus grandes entreprises mondiales et 41 chanceliers des universités les plus sélectives et prestigieuses du monde m’ont eux aussi remercié pour mes conseils.
Bill Clinton vous aurait remercié dans une lettre de vos conseils. Que disait la lettre ?
M. Clinton m’a dit qu’il était très impressionné par le caractère unique de mes idées et par ma détermination d’améliorer la qualité de vie des êtres humains aux Etats-Unis et dans le reste du monde. Il m’a d’ailleurs écrit deux autres lettres après celle-là.
Quel est l’effet que cela a eu sur vous ?
J’ai été profondément touchée par sa lettre. C’était la toute première lettre que j’ai jamais reçue de la part d’une personnalité de haut niveau. Je n’arrivais toujours pas à croire qu’un homme de son calibre ait pris le temps d’écrire à la petite fille de huit ans que j’étais. Sa réponse m’a définitivement encouragée et convaincue qu’il n’y a pas de limites à ce que je peux accomplir. Je tire une grande partie de ma confiance en moi-même de cette lettre. Je me répète constamment que si M. Clinton a pu prendre mes idées en considération lorsque je n’avais que huit ans, alors aucun de mes projets, aussi irréalisables et insensés qu’ils puissent paraître à la majorité des gens, n’est trop ambitieux pour moi. Et c’est cet état d’esprit qui guide toutes mes actions.
En 2007, Paul Wolfowitz, le président de la Banque Mondiale , vous recevait dans ses bureaux à Washington. Racontez nous.
C’était une expérience chaleureuse et inoubliable, un des événements les plus marquants de ma vie. M. Wolfowitz m’a fait l’honneur inestimable de m’accorder un entretien entre deux meetings extrêmement importants, alors que je n’avais que dix ans, en signe d’appréciation pour les conseils que je lui ai donnés sur la réduction de la pauvreté de masse et ses corollaires. Je lui en serai éternellement reconnaissante.
Qu’est-ce que vos parents, vos proches vous ont dit ? Que vous étiez génie, surdouée ?
Mes parents n’aiment pas vraiment utiliser les mots « surdouée » ou « génie » parce que ce sont là des termes qui pourraient facilement susciter la paresse et l’arrogance. Certes, ils m’ont fait comprendre que je possède un talent rare, mais ils me rappellent constamment que le meilleur des talents est l’humilité et la prédisposition à travailler dur.
Avec votre frère et votre sœur, comment ça se passe ?
Très bien. Ma petite sœur et mon petit frère sont eux aussi assez précoces. Ma petite sœur qui a maintenant huit ans lisait déjà couramment à quatre ans et est très mature pour son âge. A part cela, nous sommes une famille normale comme toutes les autres. Je fais de mon mieux pour leur servir d’exemple à suivre. J’espère qu’ils le comprennent.
Connaissez-vous le Cameroun ?
Je n’y suis malheureusement jamais allée. J’espère que j’aurai l’opportunité de m’y rendre bientôt. Cependant, je m’informe régulièrement dessus, d’autant plus que c’est le pays d’origine de mes parents, et qu’ils y sont encore très attachés émotionnellement au point qu’ils ont organisé un prix pour les meilleurs élèves du Cameroun au Baccalauréat et au Probatoire en 2008 et en 2009.
Racontez-nous ce que vous savez du Cameroun
Je rencontre et fréquente un bon nombre de Camerounais, et j’ai constaté que les Camerounais sont des personnes très intelligentes et talentueuses, et ont une grande confiance en elles-mêmes. Je suis d’avis que ce sont là des qualités qui, si elles sont exploitées de manière effective, peuvent faire avancer le Cameroun à grandes enjambées et en faire un des pays les plus prospères du monde en l’espace de quelques années. J’ai cependant l’impression que les jeunes camerounais ne sont pas pleinement conscients des atouts considérables qu’ils possèdent et de toutes les grandes choses qu’ils peuvent réaliser avec les ressources qu’ils ont à leur disposition. Je ferai de mon mieux pour les inspirer à découvrir toute l’étendue de leur potentiel et à en tirer le maximum.
Etes-vous au courant de ce qui se passe en Côte d’Ivoire ?
Oui. C’est très dommage que M. Gbagbo n’imite pas l’exemple de M. Al Gore
qui a concédé la défaite lors des élections présidentielles aux Etats-Unis en l’an 2000, quand bien même il avait de bonnes raisons de continuer à contester les résultats. Il a respecté le système démocratique en place. Juste quelques années plus tard, M. Gore a obtenu le prix Nobel de la paix pour sa campagne globale de sensibilisation sur le réchauffement de la planète. Malheureusement, beaucoup d’Africains ne semblent pas encore comprendre que la grandeur et les honneurs ne s’obtiennent pas uniquement en occupant une position de pouvoir en politique. M. Gbagbo aurait pu rendre un plus grand service à lui-même, à son pays et même au monde entier en quittant le pouvoir avec grâce et en consacrant son talent et son expérience à une grande cause qui affecte son pays et même l’humanité toute entière.
C’est quoi votre rêve aujourd’hui ?
Mon objectif est d’amener des millions de jeunes gens à travers le monde à se rendre compte que rien n’est impossible et d’utiliser mon propre exemple pour les motiver à apporter une contribution considérable au progrès et à l’épanouissement de leur communauté. Une des raisons essentielles pour lesquelles je réalise tant de choses peu usuelles à un si jeune âge est que je veux démontrer l’impact qu’une seule adolescente peut avoir dans le monde. Je vois tant de jeunes personnes à travers le monde, et particulièrement en Afrique, qui pourraient faire de grandes choses, mais sont convaincues que certains objectifs sont impossibles à réaliser dans les circonstances dans lesquelles ils se trouvent. J’espère qu’à travers mes réalisations, je pourrai amener les jeunes à prendre conscience de l’immense potentiel qu’ils ont de faire la différence dans leur environnement immédiat. Tant de jeunes sous-estiment ce dont ils sont réellement capables et par conséquent, l’immense réservoir d’énergie physique, intellectuelle et créative est à peine utilisé et les problèmes qui pourraient être aisément résolus ne le sont pas. Cependant, les jeunes n’en subissent pas moins les conséquences. Je veux qu’ils sachent qu’ils ne sont pas obligés de demeurer des victimes passives de leur environnement, qu’ils ont le pouvoir de changer les choses.
Je parlais d’un rêve professionnel. Ce que vous aimeriez devenir…
J’aimerais un jour devenir Secrétaire général de l’organisation des Nations unies (Onu). J’aime être au cœur des problèmes les plus épineux qui affectent l’humanité et y apporter des solutions simples mais efficaces. D’autre part, j’aime amener les gens de tous horizons à travailler de concert dans le but de résoudre ces problèmes, et ce sont essentiellement là les rôles du Secrétaire Général de l’Onu. Cependant, même si je ne deviens pas Sg de l’Onu au futur, le rôle et les responsabilités que j’assumerai dans la société seront similaires aux siens. D’ailleurs, dans les mois et années à venir, je compte former une coalition d’adolescents et jeunes adultes parmi les plus talentueux et ambitieux du monde qui partagent mon désir profond d’améliorer la qualité de vie de millions de personnes. Avec les idées et stratégies simples mais très effectives que j’ai conçues, nous pourrons résoudre ou du moins contribuer largement à la solution des problèmes que même les plus grands dirigeants de ce monde ont du mal à adresser.
Et votre rêve de fille ?
Dans sa réponse à ma lettre le président George W. Bush m’a dit : « Je m’attends à ce que tu écrives un nouveau chapitre chargé d’espoir dans l’histoire des Etats-Unis » et Dr. Miklos Rethelyi, le ministre hongrois de l’Education m’a écrit ceci : « Continue sur cette lancée et tu deviendras une source d’inspiration pour les générations futures. » Les propos de ces deux leaders résument très bien mon rêve de jeune fille, qui est d’établir de nouveaux standards de performance et de compassion, et d’être par conséquent une source d’inspiration pour les jeunes gens de ma génération et des générations à venir.
Entretien avec Ingrid Alice NGOUNOU (Journalducameroun 04/01/2011) et repris par Le Messager