dimanche 25 décembre 2011
Son 2e album est un pot-pourri aux senteurs de maturité, couché sur du live.
Le public camerounais la découvre en 2008 avec son titre « Le fric je m’en fous ». Un album qui portait fébrilement les balbutiements d’une jeune fille en quête de personnalité musicale. Si ce fut un succès d’estime, le deuxième album sera un vrai succès. « Aoua » est l’un des meilleurs albums de l’année 2011. La réussite de ce deuxième opus de Mia Ngiamba se construit sur trois éléments forts qui, on l’espère, vont être désormais son empreinte existentielle dans le patchwork musical camerounais. Il y a le choix technique d’enregistrer un album complètement en live où la place est donnée aux instruments, vents et orchestrations vraies, puis il y a la qualité des textes qui s’est améliorée et, enfin la voix qui a gagné en maturité, en rondeur et en justesse. Si on tourne la page de la technique, « Aoua » est d’abord un merveilleux voyage de la vie de l’artiste, qui s’ouvre à nous, sans honte.
La promenade que Mia Ngiamba offre dans son deuxième album a dix stations. Des larmes, de l’espoir, de l’amour, du respect, et l’hymne à Dieu. Le premier arrêt est Walga si, qui signifie « lève-toi ». Un message pour ceux qui pensent que devant leur destin s’arrêtent les problèmes, la fille de Kribi leur demande de décroiser les bras et de se lever pour avancer. Un rythme d’afro beat très enlevé, qui colore d’ailleurs l’ensemble de l’album.
On redescend dans une ballade très intimiste, « Tu seras ». Une mère donne des conseils à son enfant qui va la quitter. « Que l’amour et le pardon dans ton coeur te guideront chaque fois…Toi la chair de ma chair, j’écris les mots humble et fier dans ta main pour que tu n’oublies pas ». La vie ne lui ayant pas toujours fait de cadeau, Mia rappelle dans « Par amour », « qu’au lieu de perdre un oeil, je préfère encore vivre toute seule. Pourquoi se déchirer, quand on peut vivre loin de l’autre… ». Puis ce sont des titres en anglais comme « Hope », en Ngoumba comme Biweli (l’absence), Oya, Mioung, Nounga Me où elle rend grâce à Dieu, qui sont de vrais régals pour l’oreille avertie. La voix épouse si bien les instruments, qu’ils font corps et parlent d’une même note juste, à l’esprit et l’âme.
La dernière station « Celle là » est un concentré de bonheur, sur la qualité des textes et sur le chant où l’artiste clame un poème de femme seule qui sait qu’elle « n’est pas une femme comme il faut, une épouse, une mère, celle qui t’a donné un fils, tout ce qui fait ton bonheur. Je suis celle qu’on oublie, qu’on fait semblant de ne pas voir, celle qui doit sourire malgré la honte et la douleur… ». La technique vocale est impressionnante car l’artiste marque un accent sur la prononciation des voyelles qui augmente la crème de la musicalité déjà bien élaborée par un groupe de musiciens camerounais accomplis.
L’arrangement et l’orchestration en live ont été faits par Alain Oyono, jeune génie du saxophone. Moussa drums a assuré à la batterie et aux percussions tandis que Arthur Manga et Martien Oyono ont injecté d’impressionnante lignes de guitares. Denis Moussinga et Christian Oyono ont donné la chair à « Aoua » avec des notes de piano chaudes, impertinentes et justes. Le résultat est un beau vase de bonheur, qui en procurera sans aucun doute, à chaque ouverture. Avec « Aoua », Mia Ngiamba est passée de fille à femme, puis d’apprentie chanteuse à artiste. Une vraie artiste, complète, généreuse et mature.
Par Marion Obam (Mutations)