dimanche 19 janvier 2014
Roger Jean-Claude Mbédé, condamné à 3 ans de prison pour homosexualité, est mort vendredi dans son village natal. Dans un entretien accordé à FRANCE 24, son avocate, Me Alice Nkom, accuse la famille du Camerounais de l’avoir "laissé crever".
ll était devenu un symbole, à son corps défendant. Roger Jean-Claude Mbédé, condamné en avril 2011 à trois ans de prison pour homosexualité, est décédé le 10 janvier dans le petit village de Ngomou, près de Yaoundé, au Cameroun. Alors qu’il avait été libéré sous caution en 2012, son affaire, devenue emblématique pour les défenseurs des droits des homosexuels, devait être la première jugée par la Cour suprême. Pour l’une de ses avocates, Me Alice Nkom, l’homme de 35 ans, qui souffrait d’un cancer des testicules diagnostiqué en juillet 2013, est mort "séquestré" par sa famille.
En mars 2011, l’étudiant en philosophie avait été interpellé après avoir envoyé un SMS à un autre homme. "Je suis amoureux de toi", écrivait-il tout simplement. Arrêté sans mandat d’arrêt et sans infraction caractérisée, les gendarmes l’avaient roué de coups lors de son audition, selon le témoignage qu’il avait confié à Human Rights Watch. Celui qui m’interrogeait (...) a appelé son collègue pour me passer à tabac. Il m’a donné un premier coup dans la bouche. Puis un autre, et encore un autre, et il a déchiré ma chemise. Ils ont jeté mes chaussures. Lorsque j’ai été emmené (au bureau du procureur, j’étais pieds nus, comme un bandit."
Roger Jean-Claude Mbédé avait finalement avoué de précédentes aventures, ce qui constitue un délit selon l’article 347 bis du Code pénal camerounais qui criminalise les "rapports sexuels avec une personne de son sexe". Un mois plus tard, il était condamné en première instance à une peine de trois ans dans un pays où l’homosexualité est passible de 5 ans de prison.
Après un an de détention, l’étudiant, dont la santé s’était considérablement dégradée, avait été remis en liberté dans l’attente de la décision de la Cour d’appel. Le 16 juillet 2012, malgré l’émoi international provoqué par son cas, sa peine avait été confirmée. Il avait alors introduit un pourvoi en cassation auprès de la Cour suprême et s’était retiré dans son village natal de peur de représailles mais aussi de retourner en prison.
Me Alice Nkom, présidente de l’association pour la défense des droits des homosexuels (ADEFHO) au Cameroun, a accepté de revenir pour FRANCE 24 sur les circonstances de sa mort. Elle affirme que Roger Jean-Claude Mbédé est mort "séquestré", confiné dans une chambre par ses proches pour qu’il expie sa "faute" : son homosexualité.
Source : France 24