mercredi 5 mai 2010
Dans un communiqué rendu public hier à Douala, le président de cette institution se dit choqué par la mise sur la place publique d’informations couvertes par le secret médical.
Issa Tchiroma n’y était pas allé du dos de la cuillère jeudi dernier au cours du journal parlé de 20 heures sur les antennes radio de la Crtv. Alors que la présentatrice annonçait en ouverture, la présentation du rapport d’autopsie qui avait été pratiquée lundi, 26 avril 2010 au Centre hospitalier et universitaire (Chu) de Yaoundé par des médecins légistes, le ministre de la Communication indiquait quelques instants plus tard qu’il s’agissait plutôt du " rapport du responsable de l’infirmerie de la prison de Kondengui adressé au régisseur" de ladite prison.
L’opinion avait ainsi assisté médusée, à la mise sur la place publique du rapport médical de Germain Cyrille Ngota Ngota, décédé dans la nuit du 21 au 22 avril 2010 à la prison centrale de Yaoundé. D’autant que, Issa Tchiroma Bakary indiquait ainsi avoir "l’honneur de (…) présenter les circonstances du décès du nommé Ngota Ngota Germain Cyrille. Il s’agit d’un patient de 39 ans reçu à l’infirmerie le 11 mars 2010 au lendemain de son incarcération pour la visite médicale de routine. A la date sus indiquée, l’examen médical a mis en évidence l’hypertension artérielle (190/120mmHg) et la hernie inguinale gauche non compliquée. Le dépistage volontaire du Vih-Sida proposé à l’intéressé s’est révélé positif mais ce dernier n’était pas venu retirer le résultat…".
Face à ce que d’aucuns n’ont pas manqué de dénoncer comme une violation flagrante de la déontologie dans le domaine médical, l’Ordre national des médecins du Cameroun par la voix de son nouveau président Guy Sandjon est monté au créneau hier pour dénoncer cette attitude. Dans un communiqué rendu public à Douala, le président de l’Ordre dit la surprise de l’organe qui "a pris connaissance par le biais des médias du dossier médical d’un patient en l’occurrence le défunt Ngota Ngota Germain Cyrille (dit Bibi Ngota)". Guy Sandjon poursuit en indiquant que " cette façon de procéder a profondément choqué les médecins que nous sommes, car le secret médical est un droit absolu pour tout patient comme le stipule l’Article 4 du Titre 1er du décret n°83-166 du 12 avril 1983 du président de la République portant Code de déontologie des médecins".
Le président de l’Ordre national des médecins du Cameroun en profite d’ailleurs "pour rappeler à tous les médecins du Cameroun le strict respect du Code de déontologie pour lequel nous avons tous prêté serment". Selon une indiscrétion, l’ordre des médecins qui se réunit bientôt devrait sanctionner le dernier médecin traitant de Bibi Ngota qui vient, à travers la divulgation des informations médicales secrètes de son patient de violer son serment.
On se rappelle que dans un entretien paru dans ces mêmes colonnes hier, le ministre de la Communication répondant à la question de savoir s’il n’avait éprouvé aucun embarras à révéler le secret médical d’autrui a répondu " Embarrassé, peut être. Mais c’est vous les hommes de médias qui m’avez amené à le faire… Vous avez dit qu’il est mort de torture.
Vous avez dit qu’on ne lui prodiguait pas de soins à la prison. Dans mes deux précédentes déclarations, je l’ai dit de manière indirecte, qu’il était malade, on est passé au test du Vih, qu’il n’a pas récupéré les résultats. J’ai dit de manière voilée, avec pudeur de quoi il est mort. Mais vous les journalistes, en dépit des explications du gouvernement, vous dites qu’on l’a torturé, qu’on l’a empoisonné, etc. Qu’est-ce qu’il restait au gouvernement pour se défendre.
"Interrogé ensuite sur la possibilité d’éventuelles poursuites judiciaires à son encontre le ministre de la Communication a relevé " Qu’est-ce que j’ai dit de déplacé ? Je n’ai pas violé le secret médical… L’enquête prescrite par le chef de l’Etat suit son cours. Ce sont les magistrats, s’ils en ont convenance, qui vous diront de quoi il est mort "
Par Jean Francis Belibi (Mutations)