jeudi 1er avril 2010
C’est seulement en fin de semaine dernière que le gouvernement du Cameroun a donné sa position (officielle) sur l’affaire Titus Edzoa, Thierry Michel Atangana et compagnie, relative au détournement des deniers publics.
Affaire inscrite désormais dans le cadre de l’Opération Epervier qui vise à assainir la gestion des finances publiques au Cameroun. Depuis 13 ans que Titus Edzoa et Thierry Michel Atangana croupissent dans les cellules du secrétariat d’Etat à la défense, SED, c’est la première fois qu’une telle déclaration est faite. Réagissant aux propos de l’avocat de Michel Atangana, Me Rémy Barousse, Issa Tchiroma, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement n’a pas pu se contenir. Surtout que l’image du Cameroun est « attaquée » et que c’est son président qui serait « visiblement recherché ». Répondant aux questions de notre confrère de RFI, Issa Tchiroma Bakary, après avoir renié tout caractère d’acharnement sur la personne de Thierry Atangana, a précisé que ce dernier n’est pas dangereux. « Thierry Michel Atangana n’est pas un fonctionnaire. Il n’est pas un homme politique, donc n’est pas dangereux pour le régime en place ». Comme pour dire de manière insidieuse que ce sont ceux qui présentent une menace pour le régime en place qui sont passibles de poursuites.
Une réaction qui conduit à se demander pourquoi toutes ces dispositions sécuritaires autour de celui qui a été présenté à l’opinion comme étant l’homme de main de Titus Edzoa. « Le ministre de la Communication n’a fait que dire la vérité et il faut lui tirer un coup de chapeau pour cela. Il a osé dire ce que les autres ne veulent pas dire depuis 13 ans. On a voulu expressément présenter au président de la République que Thierry Michel Atangana est un homme très dangereux. Vous n’avez qu’à voir tout le dispositif sécuritaire mis autour de lui », souligne une source proche de l’accusé. En effet, poursuit la source, une enquête ouverte dans les services de sécurité avait été orientée sur une affaire de 500 millions de FCfa que Thierry Michel Atangana aurait remis à Remy Ze Meka pour fuir le pays et intenter un coup d’Etat. La conséquence logique est qu’une forte escouade de gendarmes est mobilisée pour « veiller et neutraliser » Thierry Michel.
Deux unités spécialisées du SED sont ainsi mobilisées avec à leur tête des officiers supérieurs qui sont chargés de produire chaque semaine des rapports, le GPIG, groupement permanent d’intervention de la gendarmerie, chargée selon certains de la lutte contre le terrorisme, et le SCRJ, le Service central de recherche judiciaire. « Il faut bien que l’impression soit donnée que Thierry Michel est dangereux. Beaucoup de gendarmes au SED tirent leurs subsides de cette impression qui est donnée. Et la majorité des rapports élaborés par ces services attestent que Thierry Michel est un homme très dangereux », confie un proche de l’accusé.
Violation du droit international
Toutes choses qui font que Thierry Michel Atangana croupit en cellule au SED depuis 13 ans, avec interdiction de sortie. « La télévision lui est interdite à partir de 20h. Il entre en cellule à 20h et n’en ressort le lendemain qu’à 9h. 13h de temps qu’il passe enfermé dans une cellule qu’on appelle ici fourgon qui est faite pour héberger des personnes pendant deux semaines maximum », explique un proche. Ce qui est contraire aux droits de l’Homme et des prisons édictés par la communauté internationale et ratifiés par le Cameroun. « Toute personne privée de sa liberté doit être traitée avec humanisme et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine… Les locaux de détention doivent répondre à des prescriptions suffisantes en matière de cubage d’air, de superficie, d’éclairage, de chauffage et de ventilation », peut-on lire dans le répertoire sur les normes internationales relatives aux droits de l’Homme à l’usage des agents pénitentiaires de l’ONU.
Une violation flagrante du Cameroun de ces dispositions qui est même allé jusqu’à refuser les visites consulaires à Thierry Michel, alors que le même répertoire stipule que « Les détenus ressortissants d’un pays étranger doivent être autorisés à communiquer avec leurs représentations diplomatiques. Vous voyez donc que les accusateurs de Thierry et autres, Amadou Ali, ont déroulé un véritable rouleau compresseur contre Thierry et les autres. Est-ce qu’il se rend compte du préjudice qu’il cause à cet innocent et la torture morale dont est victime Thierry ? », demande un proche qui interpelle le gouvernement sur d’éventuels dommages et intérêts que le contribuable sera obligé de supporter le moment venu, lorsque la réparation sera demandée.
Par Robert Ngono Ebode (le messager)