vendredi 28 juin 2013
Elève au collège adventiste de Yaoundé, la jeune fille (18 ans) du feu international camerounais, rêve de poursuivre l’œuvre de son défunt papa.
Dix ans après le décès de ton papa, quel sentiment t’anime au moment où une messe de requiem est dite en sa mémoire ?
C’est toujours la même émotion qu’il y a dix ans. Rien n’a changé. C’est un mélange de joie et de tristesse même si à sa mort je n’étais encore qu’une gamine. La joie parce que mes grands parents font du mieux qu’ils peuvent pour pérenniser la mémoire de mon père. Chaque année, il y a une cérémonie qui est organisée ici à Biteng et je crois que c’est à travers cela que je vis en gardant à l’esprit que mon papa vit toujours en nous. Par contre je suis déçue de la rapidité avec laquelle ceux qui l’ont côtoyé, fréquenté et joué avec lui l’ont rangé dans les tiroirs de l’oubli. J’entends ici ses coéquipiers de l’équipe nationale. Personne parmi eux n’est passé déposer ne fusse qu’une gerbe de fleur sur son tombeau et cela me choque énormément.
Comment as-tu vécu sa disparition tragique ce fameux 26 juin 2003 ?
Je n’avais que huit ans et j’ignorais même que c’était mon père. Je vivais à l’époque avec maman. Lorsqu’il s’est écroulé, j’ai d’abord cru qu’il n’y a rien qu’il se relèverait comme le font tous les footballeurs lorsqu’ils tombent au cours d’un match et se relèvent après des soins. Bref, j’ai pris ça comme un fait banal mais c’est des années plus tard que je me suis rendu compte que c’était mon père et que c’était vraiment la fin. Pour dire vrai, je n’ai pas de souvenir profond de mon père étant donné que je n’étais encore qu’une gamine. C’est en grandissant que je réalise à quel point il me manque. En regardant les images de lui vivant à la télévision ; en écoutant les gens parler de lui, le décrire, continuer de l’admirer. On le présente comme un héros, un vrai patriote et ça me rends vraiment anxieuse. J’aurais voulu moi aussi le connaître et le découvrir tel qu’on me l’a décrit (…) Mais c’est impossible.
A quoi ressemble la vie à la maison depuis le 26 juin 2003 que ton père est parti ?
La famille est séparée ; elle est divisée. Je suis comme une inconnue aux yeux de mes frères et sœurs. Ils ne me connaissent même pas mais moi je les connais parce que j’ai vu des photos d’eux à la maison. Aux dernières nouvelles, maman Marie Louise Foé a demandé à grand père et grand-mère de me faire sortir de la maison s’ils veulent que leurs petits-fils reviennent. Tout ça montre qu’il y a une discorde au sein de cette famille. Si seulement je connaissais l’origine de tous ces problèmes. Malheureusement j’étais encore très jeune lorsque cela a commencé. Il m’est donc impossible de dire exactement par quel bout la situation est arrivée à ce niveau.
S’il fallait émettre un vœu aujourd’hui, ce serait lequel ?
(Elle écrase une larme). Je dirais juste que tout redevienne comme avant. A l’époque où papa étais là. Que la famille redevienne unie et solidaire. Je souhaite réaliser mon rêve, être quelqu’un de bien et poursuivre l’œuvre qu’il a commencée. Je sais que ce ne sera pas facile parce que papa était quelqu’un de respecté dans ce pays mais j’essayerai de faire de mon mieux. Si possible, être plus que ce qu’il a été.
Entretien avec C.T. (Le Messager)