mercredi 19 février 2014
L’enseignant de droit pénal fait une analyse du décret du Chef de l’Etat.
Est- ce que la loi prévoit des remises de peines dans le cas particulier des détournements de deniers publics ?
La loi ne l’interdit pas et donc rien n’empêche au Président de la République de prendre cette mesure. La loi fait des restrictions sur les circonstances atténuantes. Ce sont des choses qui relèvent de la seule justice et qui ne concernent que les magistrats. Le Président de la République qui bénéfice du pouvoir d’accorder des grâces, lui, peut faire ce qu’il veut.
Quelle est la lecture juridique que vous faite de la décision du Chef de l’Etat ?
Jusqu’ici, la question était éminemment politique. Le Président de la République a décidé de mettre la lutte contre la corruption au cœur de son action politique. La remise de peines qui se faisait de façon systématique lors des 20 mai, ne bénéficiait jamais aux personnes accusées de détournement de deniers publics. Aujourd’hui, le décret de M. Paul Biya pense à ces gens-là. Cela parait donc comme quelque chose de positif car ça profite à des gens.
Chaque fois que la liberté gagne ou alors prime sur la prison, je suis toujours preneur. Mais la décision du Chef de l’Etat est surtout un message vers l’extérieur. Les personnes qui en profitent ont bénéficié de la bienveillance des partenaires étrangers du Cameroun. Il s’agit notamment de Thierry Michel Atangana, de Titus Edzoa et de Pierre Désiré Engo. Il est évident que le texte a été ficelé pour eux afin de leur permettre de passer entre les gouttes. C’est donc un texte à tête chercheuse.
Toutefois, n’y a-t-il pas un espoir pour les personnalités qui sont restées en prison ?
C’est une décision prétorienne et il faut s’en méfier. Le Président de la République choisit toujours et il s’arrangera toujours à ne pas choisir les personnes qu’il ne veut pas voir libre. En fait, c’est une décision qui est suspendue au bon vouloir de quelqu’un. Mais on peut tout de même espérer.
Propos recueillis par Eitel Elessa Mbassi (Le Jour)