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Cameroun : Quand le sexe envahit la chanson

jeudi 21 juin 2012


Ce n’est pas seulement une impression. La musique camerounaise ou ce qu’on peut aujourd’hui considérer comme tel, est de nouveau prise dans la vague dite « porno ».

Le succès grandissant des Leti’s Diva, Coco Argentée, Amazone, Jocelyne Bizar, Mani Bella et autres, est un indicateur à prendre très au sérieux. Ces jeunes femmes anonymes, il y a un ou deux ans, sont passées à un statut de star en matière de chanson populaire. Leur secret ? Une vieille recette de chez nous : concentrer les textes, le look et les prestations en général, autour du bassin. Les paroles, les clips, les spectacles. Tout est fait pour que le centre d’intérêt reste en dessous de la ceinture. Rien de bien nouveau, en vérité. Sauf que la nouvelle vague qui déferle sur les ondes des radios locales, les cabarets, et surtout les domiciles s’embarrasse très peu des subtilités du langage. A titre d’exemple, les extraits du désormais célèbre « Dans la tanière » de la non moins désormais célèbre Coco Argentée sont sur toutes les lèvres. Y compris sur celles de nos pauvres enfants.

Le problème est justement là. En voulant marcher sur les traces de leurs aînés dans le genre, la jeune génération n’a pas forcément les mêmes talents dans l’art de suggérer avec subtilité. Une certaine opinion condamnait avec véhémence les jeux de mots coquins d’une K-Tino ou d’un Mbarga Soukouss. Que diraient-ils aujourd’hui ? De manière générale, le français a remplacé les langues nationales dans les chansons. Résultat : le texte est accessible à un public plus large. Et comme la langue de Molière n’est pas forcément maîtrisée par nos chanteurs, ça donne ce que ça donne.

C’est clair, ce que nous voyons actuellement, ce n’est pas le modèle. Il se trouve pourtant que ça marche. Ce qui n’est pas surprenant. Le public camerounais s’est souvent montré friand des œuvres de ces « courageux » qui disent tout haut ce que les gens pensent ou font tout bas. C’est ainsi que la caution a pu être donnée à des personnes comme Saint-Désir Atango, Parol Sosthène, Petit-Pays, K-Tino, Mbarga Soukouss, etc. Le débat reste cependant ouvert : le public doit-il avaler tout ce qu’on lui sert ? Avant de rentrer dans des développements philosophiques sur la question, il convient de relever que la consommation de ces œuvres à la moralité douteuse est intimement liée à la méthode de promotion musicale utilisée chez nous. Où l’animateur de radio joue un rôle essentiel. Un rôle souvent entretenu à coups de billets de banque par les artistes. Le matraquage qui en résulte finit généralement par installer une mélodie et des paroles dans l’esprit des gens. Dans le même registre, et concernant particulièrement le bikutsi, les cabarets de la ville de Yaoundé et ses environs ne sont pas étrangers à la « contamination ». Ce sont de véritables laboratoires d’expérimentation pour les artistes. On y essaie les « versions originales » avant de mettre les chansons sur le marché.

Dans ce contexte, les paroliers de métier ont de plus en plus de mal à se faire entendre. Leurs thématiques jugées « ringardes » ne rencontrent plus forcément l’adhésion du public. Un public que l’on a peut-être trop habitué à la médiocrité et à la facilité, mais qui sait faire la différence. Il suffit qu’on lui propose autre chose. Les derniers concerts de l’artiste Charlotte Dipanda, à Douala et Yaoundé en ont donné la preuve cinglante.


Source : CAMEROON TRIBUNE

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