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Albert Dzongang : “ Trois ans après 2008, nous sommes toujours assis sur un volcan ”

mardi 8 mars 2011


Ancien haut cadre du Rdpc, ancien député de la nation Albert Dzongang est l’une des rares personnalités politiques du Cameroun à renoncer à tous les avantages que lui procurait sa position au sein du parti au pouvoir, pour dénoncer les incongruités et les dérives du régime. Candidat à l’élection présidentielle de 1997, il s’en est tiré avec le score que la préfectorale lui a accordé. Depuis il n’a cessé malgré tous les déboires de garder son indépendance d’esprit et de donner son point de vue très critique sur l’actualité politique. Les échauffourées du 23 février lui ont donné l’occasion, une fois de plus, d’analyser cette folle journée, de peindre les différents protagonistes et de révéler ses appréhensions sur la marche du pays. Bonne lecture !

Certains leaders et activistes politiques ont voulu commémorer à leur manière les émeutes de février 2008. Le pouvoir a réagi en leur opposant l’ensemble des forces de maintien de l’ordre et de défense, c’est-à-dire, la police, la gendarmerie et l’armée. On a assisté à des scènes de violence perpétrées par les éléments de cette armada sur une poignée de citoyens brandissant quelques pancartes. Comment analysez-vous la manifestation et les incidents qui ont suivi ?

Je ne voudrais pas être dur à leur égard, au point de les qualifier “ d’activistes politiques ” comme vous le dites, même si quelques uns sont coutumiers des coups d’épée dans l’eau et des farces qui frisent le ridicule. J’ai quand même parmi ceux qui ont été en scène ce jour-là, des personnes que je respecte, et j’ose croire qu’elles ont été simplement piégées.

Je ne sais pas si le verbe commémorer a le même sens chez vous et chez ceux- là, que dans le dictionnaire Larousse de la langue française. Mais, commémorer quelque chose, c’est en rappeler le souvenir avec plus ou moins de solennité. Je ne sais pas si ce qui a été dit ça et là était juste un rappel de souvenir. Chacun des acteurs allait de sa musique. Commémorer ne veut pas dire rééditer l’événement.

Le rôle des auteurs d’un côté, celui de la soldatesque de l’autre, font penser à une pièce de théâtre bien jouée pour un happy end connu d’avance. Le bruit entendu des acteurs durant des jours avant le 23 février, nous fait penser à quelqu’un qui, avant une rixe demande qu’on l’arrête pour qu’il ne fasse du mal à son adversaire. C’est à croire que la finalité recherchée était la médiatisation tout court.

Un soulèvement est spontané, le motif et les buts visés étant bien connus et approuvés de tous. Il n’y a pas souvent de leader aux premières heures, ainsi qu’on l’a vu en 2008. Souvenez-vous que ceux qui avaient appelé à une grève cette année-là s’étaient vite rétractés, pour annoncer qu’ils avaient eu satisfaction sur leurs revendications. Rien n’y fut fait, la rue avait déjà récupéré le mouvement, et ce qui devait arriver, arriva. Nous avions à l’époque qualifié cet événement de “ deuil Bamileké ” où chacun pleure son mort à lui.

Les protagonistes de cette année ont pratiqué ce que nous pouvons qualifier de “ commerce entre Baham et Bayangam ”, opération au cours de laquelle chacun croit tromper l’autre. Tandis que le vendeur compte sa kola par tas de 09, l’acheteur, lui, compte par tas de onze. Certains agitateurs et le pouvoir s’étaient bien mis d’accord sur le fait qu’il s’agissait d’un coup de bluff. Chaque camp y tirant un bénéfice.

Pour les uns, les médias allaient parler d’eux, et pour les autres ils allaient montrer au monde entier que le pouvoir tient bien au Cameroun, et que le peuple n’obéit pas aux mots d’ordre de l’opposition inexistante. Curieusement, ceux qui d’habitude sont qualifiés de simples activistes sans base, ont été reconnus comme opposants. Quelques policiers suffisaient pour contenir cette poignée d’individus. Mais, comme nous le disions plus haut, parlant de marché de dupe, le pouvoir s’est dit : et si par hasard ces gens étaient suivis par la population ? Il vaudrait mieux prévenir, quitte à sortir le canon pour chasser une mouche. Dans la tête des organisateurs, trottait aussi l’idée de devenir des héros au cas où leur Cap d’essai se transformairait en un coup de maître, entraînant une révolte à l’image de celle des pays de l’Afrique du Nord.

A ce jeu, le plus ridicule dans l’affaire aura été l’Etat, qui a étalé au grand jour sa frilosité, en sortant une armada pour contenir comme vous le dites vous-mêmes, une poignée de citoyens brandissant quelques pancartes. Nous prenons acte de cet état de chose, conscient que le peuple sait ce qui l’attendrait le jour où il viendrait à se mouvoir. Nous pouvons donc conclure qu’à bon entendeur salut !

Trois ans après ces émeutes de février 2008 quelle lecture faites-vous de la situation sociale au Cameroun aujourd’hui ?

Trois ans après février 2008, nous constatons que les germes qui ont occasionné ces émeutes sont toujours là et plus graves qu’avant. Ce sont : la mal-gouvernance, le mauvais choix des hommes, la corruption, le népotisme, le chômage des vieux et des jeunes, la famine, l’impunité, et surtout l’arrogance de certains parvenus qui narguent le peuple du sommet de leur confort pourtant indu, pour ne citer que ces quelques cas.

Comme mesures d’urgence à l’époque, le président de la République avait annoncé la suppression des taxes sur les importations du riz qui valait 7 500 francs Cfa le sac taxé de 50 kgs. Aujourd’hui, le même sac de 50 kgs non taxé, coûte 18 000 francs CFA soit presque le triple du coût de 2008. Ne parlons pas des autres denrées (viande, oignon, banane, poisson) dont les prix ont également doublé ou triplé, ou du macabo qui est véritablement devenu une nourriture des riches.

Nous sommes assis sur un volcan, et on a l’impression que nos dirigeants sont sourds aux directives du chef de l’Etat. Ceux qui sont appelés pour remplacer les inculpés de l’épervier font pire que ceux qui croupissent en prison. Les recrutements se font toujours à tête chercheuse et certains emplois semblent être l’apanage d’un groupe social donné. L’enseignement se privatise de plus en plus, et au détriment de la qualité. Les prix des denrées de première nécessité sont toujours plus inaccessibles et le pouvoir d’achat toujours plus en baisse. Le chef de l’Etat a d’ailleurs reconnu lui-même ce que vous n’avez cessé de dire depuis des années, à savoir que nous consommons ce que nous ne produisons pas et produisons ce que nous ne consommons pas. Cette déclaration n’a pourtant pas été suivie d’un renouvellement en poste des hommes qui ont conduit à cet état de chose, afin qu’il commence à en être autrement.. Le chômage est devenu la règle et l’emploi sous payé, l’exception. Les voleurs deviennent de plus en plus et rapidement riches, pendant que la grande majorité du peuple croupit sous une misère permanente et grandissante.

Toutes les solutions préconisées sont évoquées en terme de projets à l’horizon plus ou moins éloigné, avec beaucoup de chance que les promettants ne soient plus de ce monde au rendez-vous de leur mise en œuvre. Le peuple est impatient, et les ventres affamés auront de moins en moins d’oreilles, y compris pour entendre les bruits éventuels de canon quand l’heure de la révolte sonnera vraiment.

Les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets, même si les résultats sont tributaires de beaucoup de paramètres. Chaque pays trouve en lui-même les remèdes qui conviennent à sa maladie, le but visé étant la guérison. Le Cameroun n’est pas la France dont les dirigeants peuvent prétendre un jour que les nuages de Tchernobyl se sont arrêtés à sa frontière, pour avouer plus tard à leur peuple que cet accident nucléaire avait fait des victimes sur son sol. C’est chaque peuple qui sait comment il digère les mensonges de ses dirigeants.

Et nous devons nous demander comment se manifestera la grande révolte chez nous, si rien n’est fait pendant que le volcan dort. Le gouvernement de notre pays, au lieu d’avoir peur comme vous le dites, doit au contraire se comporter en responsable averti, et prendre en toute assurance, des mesures qui donnent de l’espoir au peuple, au lieu de l’attendre au point de non retour. Les mesures tardives et forcées, comme on l’a vu en Tunisie et en Egypte, ne servent à rien et n’empêchent plus rien, lorsque les conditions de dialogue sont déjà rompues. Et c’est ici que je ferai mienne la prédiction de Lincoln qui disait : “ On peut tromper tout le peuple une partie du temps, on peut tromper une partie du peuple tout le temps, mais, on ne peut tromper tout le peuple tout le temps ”.

Tous les pays, à un moment donné de leur histoire ont eu leur révolution, celle du Cameroun viendra à coup sûr. C’est le “ Quand ”, qui est inconnu pour le moment. Et il faut bien rappeler à tous les récupérateurs et agitateurs, ce que le 23 février vient d’indiquer, à savoir qu’ils ne sont pas la conscience du peuple. Pas plus d’ailleurs que ceux qui, de l’extérieur au demeurant, vont jusqu’à indiquer des comptes bancaires où des citoyens doivent leur verser de l’argent pour faire en sorte que “ Paul Biya dégage ”, exactement comme une bande de voyous, ou que d’autres qui organisent leur théâtre dans nos villes, avec une complicité que je trouve naïve, des médias nationaux et internationaux.

Pour revenir à votre première question, comment peut-on expliquer cette situation anecdotique, où, comme par hasard, l’un des héros fait son jogging avec son fils près de la Cathédrale de Douala, et comme par hasard c’est là que la police vient le surprendre pour qu’il ait le temps de se réfugier chez le Cardinal, et comme par hasard toujours, les caméras et les journalistes sont là pour retransmettre la scène. Souvenez-vous que les révolutionnaires des pays que vous citez, ont donné leur vie, ils n’ont pas fuit comme des lapins devant les soldats. Quand vous appelez le peuple à sortir, vous devez vous mettre devant et affronter les obstacles avec lui. C’est tout à fait nul d’aller troubler le repos bien mérité de son Eminence le Cardinal pour faire de lui, un acteur de votre comédie.

Peut-être que je devrais rappeler ici l’histoire de la femme menteuse rapportée par Jean La Fontaine dans une de ses fables, qui criait à “ la panthère ” tous les jours, faisant sortir les gens de chez eux pour s’apercevoir qu’elle s’amusait à se faire peur et qu’il n’y avait pas de panthère. Un jour, elle cria : “ la panthère, la panthère ” alors que la panthère était vraiment dans sa cour. Personne ne prêta l’oreille à ses cris, puisqu’elle avait l’habitude de s’amuser ainsi. Elle fut dévorée. La Fontaine conclut cette fable en disant qu’un menteur n’est jamais cru même lorsqu’il dit la vérité. Est-il donc surprenant que le peuple ne prenne plus au sérieux certains Camerounais devenus plus comédiens que politiciens ?

Les révoltes populaires qui secouent depuis janvier la Tunisie , le Maroc, l’Algérie, le Yemen, la Libye inspirent certains cercles politiques camerounais et semblent faire peur au gouvernement. Pensez-vous que ce qui se passe dans le Maghreb et le Moyen-Orient peut se reproduire au Cameroun ? Et pour causes ?

III Le chef de l’Etat et son gouvernement peuvent bien devancer les événements et contenir la grogne populaire, non pas avec des armes, mais avec des actes. Ne peut-on dire comme d’un homme qu’un gouvernement averti en vaut deux ?

Le gouvernement camerounais, au lieu de regarder venir les événements avec peur et incertitude, devrait pouvoir faire sa propre révolution en changeant complètement le cap de sa politique. Cela passe d’abord et avant tout, par un renouvellement des hommes du pouvoir, désormais choisis sur les critères de compétence et d’expertise et de patriotisme, davantage que sur le loyalisme aux intérêts particuliers des groupes et du parti, pour mener enfin une politique conforme aux promesses que fait le président.

Feu le Pr. Georges Ngango avait prévenu dès les premières heures du Renouveau, qu’on ne pouvait pas mettre du vin nouveau dans de vieilles outres, sans qu’il perde sa saveur. Beaucoup de collaborateurs du chef sont dépassés et ne comprennent plus rien à rien. Leur occupation consiste maintenant à user de tous les subterfuges et mensonges, pour rester aux affaires, et échapper à la prison pour certains. Ce ne sont pas eux qui peuvent conduire une politique de justice sociale, de la culture de mérite, de l’esprit national, de la fraternité et d’égalité des citoyens.

Si un médecin n’empute pas un membre gangrené, c’est tout le corps qui pourrit et entraîne la mort. Si à 78 ans le président veut rentrer dans l’histoire, il doit choisir entre son peuple et les courtisans qui l’entourent, s’en séparer ou subir tôt au tard avec eux, la fougue de ce peuple. Il a cet avantage qu’en Afrique noire et au Cameroun en particulier, on sait pardonner à ceux qui se repentissent et donnent des gages de changement.

Ma réponse à votre question sera donc non et oui. Non si le gouvernement anticipe comme on vient de dire. Oui si les dirigeants continuent à compter sur la force de répression contre un peuple qui ne revendique pourtant que son droit d’exister et de jouir aussi des biens de la nation. Les divisions tribales artificiellement entretenues battront en brèches, quand tous les misérables du pays se mettront ensemble.

Comme pour conjurer le mauvais sort le président Biya a mis sur pied une mission pour la collecte et l’approvisionnement en denrées de grande consommation. Selon vous, quelles sont les chances de réussite de cette mission ?

Si cette disposition ne tombe pas comme tant d’autres après l’effet d’annonce, et si elle est suivie d’une mise en application, je vous garantie qu’elle sera un début de solution au problème de l’autosuffisance alimentaire au Cameroun. Elle garantira une juste rémunération du fruit du labeur de nos paysans. Imaginons un seul instant que le cultivateur de Nkondjock, de Batié ou de tout autre coin enclavé du Cameroun soit assuré que désormais sa production sera payée à temps, sur place et à juste prix. Alors beaucoup vont retourner au travail de la terre aujourd’hui déserté par les jeunes. Ceci suppose donc que l’Etat garantisse des espaces cultivables, ouvre les voies d’accès, organise les marchés périodiques proches des lieux de production, et veille à ce que le cultivateur tire le juste prix de ses produits.

Les hommes chargés de la mise en pratique de cette mesure, doivent être choisis, non à cause de la consonance de leur nom, ou de leurs tartuferies, mais à cause de leurs connaissances dans les domaines agricoles dans l’organisation, et dans la protection sociale des producteurs. Ils ne doivent pas faire de cette collecte un fonds de commerce personnel, ou bien une perche pour sauter plus haut dans le monde des riches sans cause.

Le président par cette mesure relève une fois de plus comme il le fait depuis un certain temps, les manquements du ministère de l’Agriculture. Malheureusement sans en tirer les conséquences pour les défaillants. J’espère qu’il ne s’agira pas d’acheter et de vendre le poisson qui fait tant jaser, ou le riz que nous consommons sans produire. La tentative de favoritisme sur la base des engagements mensongers non tenus dans le domaine des produits de pêche, sont encore frais dans nos mémoires, pour tirer la sonnette d’alarme. Que ceux qui signent des accords avec le ministre du Commerce tiennent leurs engagements.

Sur le plan politique, les Camerounais attendent cette année l’élection du président de la République. L ’inscription sur les listes électorales ne fait pas courir le peuple électeur. Quelle explication donnez-vous à cette apathie des populations ? Et si on vous demandait ce qui fait réellement problème : Elecam dans la composition de ses membres ou autres raisons ?

Il faut reconquérir l’électeur camerounais fatigué de ne pas se reconnaître dans les différents résultats des urnes, ou fatigué de s’inscrire et de ne jamais retrouver sa carte d’électeur, alors que des voisins ont, eux, plusieurs cartes de vote. Elecam en tant qu’organisme. Voire dans sa composition, ne me gène pas. C’est l’environnement politique où les gens n’ont pas la notion de l’Etat et servent plutôt leurs chapelles politiques qui pose problème. Dans les pays que nous voulons imiter en matière politique, (France et Usa) pour ne citer que ces deux-là, c’est l’administration qui organise les élections. Simplement, parce que les fonctionnaires chargés de cette opération sont neutres dans leur décision. Ici chez nous, on a à faire à un parti-Etat dont tous les agents, même les militaires, vont battre campagne pour lui. Comment pouvez-vous penser que le directeur qui va tenir meeting au village pour le Rassemblement démocratique du peuple Camerounais (Rdpc), puisse le lendemain déclarer qu’un parti autre que le sien a gagné ?

Le flou qui entoure les inscriptions décourage tout le monde. On ne vous dit pas quel est votre centre de vote ainsi que le bureau dans lequel vous êtes inscrit. Vous devez attendre. Les mauvaises langues interprètent cette situation en disant que les cartes de vote et les bureaux seront déterminés plus tard, de manière à désorienter les électeurs jugés moins sûrs pour le régime. Pourquoi ne pas prendre du temps, s’organiser pour délivrer les cartes au fur et à mesure des inscriptions, en définissant les centres et les bureaux qui sont pourtant les mêmes depuis des années ?

Tous ceux que nous envoyons s’inscrire sont sceptiques.

Il y a également le fait, nous sommes tous Camerounais, que la désignation des membres de Elecam et leur entrée en fonctions ont été rocambolesques. Sans oublier que certains parmi eux, et non des moindres, ont fait l’objet d’une suspicion légitime, pour des faits répréhensibles. Comment dans ce cas, faire confiance à quelqu’un qui attend d’être nommé pour déclarer qu’il démissionne du parti de son désignateur ? Pour qui prend-on les Camerounais ?

Lors d’une récente visite de travail au Cameroun, un représentant du secrétaire général des Nations unies a proposé au gouvernement la révision du directoire électoral ainsi qu’une élection présidentielle à deux tours. Pensez vous que le pouvoir serait près à accepter ces propositions ?

Epargnez-moi de vos rêves. Aucune organisation ou pays étranger, ne viendra régler nos problèmes à notre place. Si l’Onu veut s’ingérer dans ces affaires et elle en a le droit, elle n’a qu’à prendre une résolution, et non des recommandations non contraignantes. Encore que même avec des résolutions, pour le cas de la Côte-d ’Ivoire, elle laisse des nègres s’entretuer. Avec les morts du commandement opérationnel à Bépanda, j’ai éprouvé ces organisations internationales. En tant que président de la Commission indépendante d’enquête, je suis allé au siège d’Amnisty international à Paris, pour m’entendre dire qu’il fallait saisir la Commission européenne, qui à son tour m’a renvoyé au droit de l’Homme. Bref, ils ont fait la sourde oreille sur ce massacre au Cameroun.

Je m’amuse quand ils glosent sur la Libye aujourd’hui. Voyez avec quel empressement les pays occidentaux gèlent les avoirs de leurs complices d’hier, dès lors que le peuple se libère. Ils font semblant de découvrir que leur ami d’hier qu’on vient de chasser était un monstre prédateur des biens de leur pays affamé.

Comme leader politique, que préconisez-vous pour amener les Camerounais à s’inscrire sur les listes électorales ?

Permettez-nous de citer une fois de plus Abraham Lincoln qui disait “ qu’un bulletin de vote est plus fort qu’une balle de fusil ”. C’est pour cela que nous encourageons nos sympathisants et les Camerounais de bonne volonté à aller s’inscrire, à voter en masse, puis à exiger le respect de leur choix par tous les moyens pacifiques ou de droit. Nous savons, et les cas de Tunisie, d’Egypte, de Libye etc.., sont là pour le prouver, qu’aucune armée ne peut vaincre un peuple déchaîné. Hélas, ces entraves que relèvent à juste titre le Social democratic front (Sdf) sont réelles, et nous découragent.

Personnellement quelle crédibilité accordez-vous à Elecam ?

 Pourquoi l’Etat s’obstine-t-il à faire la sourde oreille ? J’ai entendu un membre de ce “ machin ” d’Elecam proclamer, toute honte bue, qu’il avait “ rang et prorogatives de ministre ”. Vous voyez que dans leur tête, ils sont plutôt membres du gouvernement que personnes neutres. Peut-on attendre d’un ministre ou assimilé qu’il fasse autre chose que la volonté de celui qui l’a fait roi ? Un ministre, comme a dit quelqu’un, “ ça ferme sa gueule ou ça démissionne ”.

Le Cameroun est l’un des rares pays dont la diaspora ne vote pas. Comment expliquez-vous cet ostracisme ?

Nous sommes également un des rares pays qui ne permettent pas la double nationalité, et dont presque tous les dirigeants et leurs descendants ont une autre nationalité que la camerounaise. Ce que nous avons toujours déploré c’est le fait que, ces frères qui sont partis pour une raison ou une autre, mais qui pour la plupart n’ont pas cessé d’aimer leur cher pays le Cameroun, même si, pour des raisons de commodité ils ont été amenés à prendre une autre nationalité, se trompent souvent de lutte. Au lieu de se battre avec notre appui, nous qui sommes restés au pays, pour avoir leur droit de vote et de citoyen camerounais à part entière, ils s’érigent en maîtres, en donneurs de leçons, en juges suprêmes de ceux qui ont le malheur de se battre au pays. Certains, plus cyniques sont, disent-ils, des militants du parti au pouvoir, sans possibilité de voter pour ce parti.

Nous pensons -et le souhaitons - que les concernés, c’est-à-dire la diaspora, doivent prendre le chef de l’Etat au mot, réclamer leur droit de vote, avant de proclamer qu’ils sont candidats à ceci ou cela, alors que, sauf s’ils l’ignorent, on ne peut pas être éligible sans être électeur. Vous n’allez quand même pas attendre d’un pouvoir, qui sait bien que ses fils expatriés ne sont pas d’accord avec sa politique, qu’il leur donne sans résistance l’arme pour se faire abattre. C’est de bonne guerre en Afrique. Feu Omar Bongo, repris d’ailleurs par son beau-père Sassou Nguesso, déclarait qu’ “ on ne saurait organiser une élection pour la perdre ”. C’est tout dire sur la perception que les dirigeants africains ont de la démocratie.

Avec ses 78 ans, le Rdpc persiste à présenter une fois de plus Paul Biya comme son candidat naturel à l’élection présidentielle. Ses discours, ces derniers temps ne sont que des tissus de promesses malgré ses 29 ans de pouvoir bientôt. On ne peut pourtant pas soutenir que son parti connaît une pénurie en ressources humaines. Pourquoi n’y suscite-t-on pas de nouvelles figures susceptibles d’assurer la relève ?

Je voudrais ici affirmer que la jeunesse n’est pas seulement l’âge, mais un climat de cœur. On peut à 78 ans être un bon président. Vous devez en tant que journaliste connaître les textes qui régissent les sujets mis en traitement. C’est même de la fanfaronnade que les thuriféraires du Rdpc font. Les textes de base de leur parti sont formels. Le président national est le candidat naturel du parti à l’élection présidentielle. L’appel à la candidature que certains activistes du Rdpc ont même édité en roman, est la preuve du caractère folklorique de ce parti. Sauf à penser que, comme vous, ces appelants sous- entendent, que normalement à cet âge, leur président devrait se retirer, ou se propose de le faire. Alors, en ce moment-là, peut se poser la question de la relève dont vous parlez. Il se dit d’ailleurs que bon nombre d’anciens cadres en disgrâce aujourd’hui, le sont du fait d’avoir lorgné du côté du pouvoir.

Et puisque vous parlez de nouvelles figures, je profite pour rappeler que la jeunesse en politique n’est pas toujours fonction de l’âge, mais souvent une affaire de virginité aux affaires. On peut à 80 ans être jeune en politique, pendant qu’à 40 ans, certains sont déjà des vieillards, en politique bien entendu.

Je ne peux entrer dans la cuisine interne d’un parti que j’ai quitté voilà bientôt 16 ans. Je puis seulement en toute sincérité vous dire que beaucoup de “ militants ” du Rdpc sont de grands patriotes qui attendent simplement que l’opportunité leur soit donnée pour servir autrement leur pays. Il n’y a pas carence de cerveau dans ce parti.

Je me suis fais dire que l’opération épervier a attenué les malversations financières, qu’en est-il de la corruption qui se déroule entre quatre murs, à l’abri de toute indiscrétion ?

C’est vous qui dites que l’opération épervier a atténué cette pratique. Au contraire les nouveaux nommés sont plus rapaces que ceux qui sont aujourd’hui incarcérés. C’est d’ailleurs pourquoi l’opinion publique prétend, que leur arrestation est liée à leurs ambitions politiques. La corruption est l’enfant de l’impunité et du favoritisme. Tant que ses parents sont toujours là, elle se porte plutôt très bien.

Quand des gens sont nommés à des postes qu’ils ne méritent pas, leurs premières réactions est de se mettre rapidement à l’abri du besoin, demain étant incertain. Vous entendez certains dirent tout haut “ Vous croyez qu’on m’a envoyé ici pourquoi. C’est pour préparer ma retraite ”.

Auriez-vous des propositions à faire pour une meilleure conduite des affaires publiques au Cameroun ?

Notre parti, Dynamique pour la renaissance du Cameroun, ( la Dynamique ) en abrégé, a déjà, dans son ouvrage intitulé “ Sauvons le Cameroun ” que vous connaissez bien, donné les grandes lignes de sa vision pour gouverner notre pays autrement.


Entretien avec Jacques Doo Bell(Le Messager)

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